Pouvez-vous présenter votre maison d’édition ? En quelques lignes… (combien grands dieux ?) Quelle est votre ligne éditoriale ?

Ce genre de questions, quoique parfaitement légitimes, qu’elles émanent de lecteurs, libraires, partenaires ou institutionnels, ont le don de déclencher des crises de panique. Comment résumer ce qui n’aime pas l’être ? simplifier ce qui est complexe ? donner une apparence d’ordre et de rigueur à une sorte de chaos où le hasard a joué le plus grand rôle ? autrement dit la vie.

Selon les circonstances il a bien fallu donner des réponses. En voici quelques unes

Celles-ci figurent dans notre dernier dépliant de présentation :

« La Déviation…

est une petite maison d’édition, installée dans la Creuse à La Villedieu (50 habitants),
aime les livres, la littérature et la circulation des idées,
est désireuse de faire vivre la bibliodiversité,
travaille en toute indépendance et en toute liberté,
n’a pas vraiment de ligne éditoriale, avouons-le,
a été créée par un ancien libraire,
préfère la vente en librairie à la vente en ligne,
privilégie les imprimeries de proximité,
ne publiera jamais de livre à 19,90 €,
a des convictions et des principes, non mais !
est fidèle à ses auteurs et les accompagne dans la durée,
est indifférente aux modes,
entretient un rapport particulier au temps et à la mémoire,
n’est pas (encore) rentable,
est une entreprise artisanale,
bénéficie du soutien de la région Nouvelle-Aquitaine
ne fait pas de livre numérique pour diverses raisons,
publie peu et s’efforce de le faire bien,
considère le livre comme un outil de résistance aux effets du flux permanent de l’information.
et comme un objet magique capable de défier le temps… »

Cette présentation synthétique est la plus récente. Elle s’est nourrie de présentations plus anciennes. En toute transparence en voici quelques-unes.

Ici il s’agissait de répondre à deux questions dans le magazine de l’AENA (Association des éditeurs de Nouvelle-Aquitaine, dont La Déviation est adhérente). Le ton était plus personnel avec un léger brin de provocation :

« Quelle est votre ligne éditoriale ?
Peut-on sérieusement considérer que le hasard des rencontres constitue une ligne éditoriale ?
C’est pourtant lui qui est à l’origine d’une grande partie du catalogue de La Déviation. D’ailleurs je ne cherche pas à « construire un catalogue »mais à éditer des livres. Inévitablement ceux-ci me ressemblent, ou disent quelque chose de ma vie passée, de mes amitiés, de mes engagements, de mes curiosités. La ligne éditoriale c’est moi.
C’est d’ailleurs l’un des charmes de l’édition indépendante. Permettre à des livres d’exister dans une logique artisanale : l’objet unique, les petites séries, l’imprévu, celui qui ne répond pas aux fameuses « attentes du public », le pas rentable… dont l’absence passerait inaperçue mais rendrait le monde plus terne. Ce qu’on appelle joliment la bibliodiversité.


Comment est née votre maison ?
Au commencement était l’amour des livres. Avant d’être éditeur, j’ai été libraire et surtout lecteur.
Les livres sont des objets magnifiques. Ils n’ont pas le pouvoir d’arrêter le temps mais parviennent à jouer avec lui, savent parfois le freiner, le défier. Il y a les livres qui choisissent de s’intégrer dans le flux de l’information, font leur petit tour et disparaissent. Et il y a ceux qui
tentent de résister, font un pas de côté, regardent en arrière, traînent des pieds.

La Déviation c’est à la fois un manifeste et le résumé d’une vie. C’est le nom de mon anciennelibrairie, à Caudebec en Caux, en Normandie et c’est aussi le nom d’une bande dessinée emblématique de Jean Giraud parue dans Pilote, le journal de René Goscinny, ce qui nous ramène
à la Librairie Goscinny que j’ai créée à Paris en 2005. La Déviation m’a amené maintenant à La Villedieu (50 habitants) sur le plateau de Millevaches où l’enjeu de la bibliodiversité se marie bien avec les choix de vie écolos. »

Dans le cadre de notre dossier de subvention régionale pour 2022 les précisions suivantes avaient été apportées :

« Chaque titre édité est en effet le fruit d’une rencontre avec un auteur, de centres d’intérêt communs, de valeurs partagées. La Déviation souhaite se limiter à une dizaine de titres par an, en prenant le temps de les réaliser toujours plus soigneusement et de les accompagner au mieux dans leur diffusion, sur la durée. Chacun est comme un objet artisanal, unique, rétif aux classifications et aux effets de mode, édité
en toute liberté.
Cela n’empêche pas la ligne éditoriale de se préciser spontanément au fil des titres édités :
Amour de la littérature, de la circulation des idées et de l’indépendance éditoriale.
Un rapport particulier au temps et à la mémoire. Le livre comme outil de résistance aux effets du flux permanent de l’information.
Des convictions et des principes :
Droits d’auteur décents (généralement 10%) et versement d’à-valoir
Respect des libraires et de l’ensemble de la chaîne du livre,
Respect des lecteurs. Des livres bien faits et des prix de vente clairs (pas de 19,90 € chez nous !)
Prise en compte des enjeux écologiques notamment dans le choix des imprimeurs »

Et plus précisément concernant « respect et suivi des auteurs » :
« Les contrats d’édition suivent les recommandations de la SGDL. Les droits d’auteur sont généralement de 10% et l’à-valoir supérieur aux espérances de vente de la première année. La Déviation fait le choix d’inscrire leurs livres dans la durée. La Déviation est fidèle à ses auteurs et les accompagne dans la diversité de leur travail.
Elle réédite aussi certains de leurs anciens titres épuisés depuis longtemps.
Ainsi plusieurs auteurs du programme éditorial de 2022 étaient déjà présents dans le catalogue (Nicole Leroux-Morlet, Denis Langlois, Jean-Luc Coudray, Gilles Vidal, Pascal Dessaint, Clément Lemoine, Thierry Maricourt, et Gérard Streiff »)

Et là, dans le cadre d’un dossier auprès du CNL (Centre national du livre) :

« Les éditions La Déviation sont installées en zone rurale, dans le village de La Villedieu (Creuse).
Elles ont édité une quarantaine de titres depuis 2017.
La Déviation est le fruit d’une histoire déjà longue, celle de la SARL SCUP créée en 1995 autour d’un projet journalistique et qui reste la société support des éditions. SCUP a d’abord évolué en proposant ses services : communication, PAO, web, presse d’entreprise, reprographie et
impression numérique…
À partir de 2005, après une formation complémentaire à l’INFL, ce fut la Librairie Goscinny, Paris 13e, jusqu’en 2013 puis la librairie La Déviation à Caudebec en Caux (Seine-Maritime).

En 2019 cette expérience cumulée est mise au service des éditions qui reprennent le nom dela librairie : La Déviation.

En 2020 La Déviation passe en diffusion déléguée avec CED (ce n’est plus le cas, nous avons cessé – à l’amiable faut-il le préciser – notre collaboration avec CED mi-2022 pour repasser en auto-diffusion), et Pollen pour la distribution (ça c’est toujours vrai).
Nouvelle étape en 2021 avec la fermeture de la librairie de Caudebec en Caux et l’installation à La Villedieu.

La ligne éditoriale ne se laisse pas définir facilement… Chaque titre édité est le fruit d’une rencontre avec un auteur, de centres d’intérêt communs, de valeurs partagées. Chacun est comme un objet artisanal, unique, rétif aux classifications et aux effets de mode. Avec l’amour
de la littérature comme point commun et souvent un rapport particulier au temps, à la mémoire.
Le livre comme outil de résistance aux effets du flux permanent de l’information.
Cette ligne éditoriale ce sont peut-être les auteurs qui l’incarnent le mieux. Si certains sont peu connus, sinon localement ou selon leur spécialité, d’autres sont des auteurs confirmés ayant une audience nationale.
Citons Patrick Pécherot, Pascal Dessaint, Denis Langlois, Thierry Groensteen, Jean-Luc Coudray, Gérard Streiff, Olivier Dartigolles, Thierry Maricourt, Alain Rustenholz, Gilles Vidal…
La Déviation souhaite se limiter à éditer 5 à 8 titres par an, en prenant le temps de les réaliser toujours plus soigneusement et de les accompagner au mieux dans leur diffusion. Avec quelques principes : droits d’auteur décents, respect des libraires et de la chaîne du livre, prise en compte des enjeux écologiques, prix de vente clairs (pas de 19,90 € chez nous !) … »